Les étudiants à l’assaut des grosses BM

Les étudiants sont très invasifs dans le milieu bibliothécaire municipal.

Le préjudice est réel auprès des usagers citadins. Pour parler de l’exemple que je connais le mieux, les usagers de la BM de Mériadeck à Bordeaux sont dépourvus de places assises (ou si peu), emparées par les étudiants qui, phénomène surprenant, courent le matin dans la bibliothèque pour aller chercher des places. Ainsi, tel un premier mercredi des soldes, chaque jour connait sa cohue d’étudiants. Cette cohue invasive (le vocabulaire est négatif à dessein, provocation ironique car cette venue est positive, je trouve) soulève plusieurs questions.

Première d’entre elles : pourquoi ne vont-ils pas à la BU ?

Des étudiants attendant l'ouverture de la bibliothèque / par gadl sur FlickR /CC-BY-SA

Des étudiants attendant l'ouverture de la bibliothèque / par gadl sur FlickR /CC-BY-SA

A Bordeaux, c’est clairement un problème de place et d’accessibilité. Les étudiants qui ne veulent pas aller à une demi-heure du centre-ville ont le choix entre une BU pluridisciplinaire pleine à craquer (s’agrandira-t-elle un jour ?), une BU place de la Victoire (pleine) et la bibliothèque municipale. Cette troisième voie est la solution choisie[sic] par beaucoup d’étudiants en médecine. J’ai appris qu’un nombre important d’entre eux se félicitait par ailleurs de l’absence de wifi qui leur permettait de se concentrer sur les révisions. Cette lacune trouve donc in fine un intérêt.

Évidemment, ils n’utilisent que très peu les collections de la BU (d’ailleurs, le fait qu’ils se contentent de l’absence de wifi montre bien qu’ils cherchent seulement un lieu calme [1]). Ce dont ils ont besoin, ce sont de salles d’études à proximité. L’université ne leur en propose pas.

Il y aurait donc un créneau. Les salles d’étude avec des médiateurs (des surveillants ?) et très peu de collections, par exemple, dans le prolongement des salles d’étude d’antan dont ont vaguement hérité les collèges et lycées ?

On pourrait alors conclure qu’au final, en-deçà de nos prétentions coûteuses, ce ne sont pas des learning centers qui manquent aux étudiants, seulement des salles d’étude… C’est sous la menace de cette conclusion aussi, je crois, que des bibliothécaires craignent le tout numérique (au sens de bibliothèques sans papier comme l’illustrent quelques exemples récents) : le numérique n’étant pas visible physiquement, que justifie concrètement son existence si un grand nombre de lecteurs potentiels n’utilise pas la ressource ? Par conséquent, que justifiera l’existence des bibliothécaires ?

Le défi à relever semble pérenne : mettre les ressources à disposition, susciter l’intérêt et entretenir l’intérêt (de la « communauté »[2]). La pérennité du challenge peut décourager et laisser croire pour les premiers que leur métier est à l’article de la mort ; pour les seconds que les mutations sont ralenties par les premiers. Le seul point constant est d’assurer, pour reprendre l’expression de Michel Melot, la rencontre « entre un ensemble de documents et un ensemble d’usagers ». Sage parole à méditer !

[1] Les étudiants se plaignent régulièrement auprès des bibliothécaires du bruit ambiant. « Normal, vous êtes dans une bibliothèque municipale », leur répond-on logiquement.

[2] Le bibliothécaire, Community Manager physique ?

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3 réflexions sur “Les étudiants à l’assaut des grosses BM

  1. Oliburuzainak dit :

    « Pourquoi ils ne sont pas à la BU » ? Mais ils y sont : même qu’elle est régulièrement saturée, LOL!

    Ce qui est moins drôle, c’est que, par exemple dans le cas le la BU Santé à 3 arrêts de tram de la BM, c’est une BU des Années 70 qui est saturée, avec un volume d’espace perdu assez phénoménal ; et sans les espaces de travail de groupe ou individuel des BU des Années 2000.

    Des espaces de travail proposés par l’université ? Mais ils existent, comme les amphis de permanence le soir jusqu’à 00h ou les amphis de révision en vacances. Mais avec le planning des enseignements, l’offre de dédouble pas en journée l’offre des BU.

    Sur la solution de l’offre par les learning center, il faut bien que tout le monde soit sûr de parler de la même chose ; lieux multifonctionnel et multiservice, le LC est aussi là pour offrir des espaces sociaux …et des espaces de travail, justement.

    La question du sous-dimensionnement de la Pluri (« la bibliothèque du CIJA », pour les étudiants) est aussi un sujet qui m’intéresse beaucoup, pour y avoir travaillé il y a quelques années. Si j’étais joueur de Sim City, dans le chantier actuel administratif et financier des universités (bientôt au singulier ?) je lorgnerait sur le départ prochain de l’UFR de Dentaire Bx2 du centre-ville… 😉

  2. Cet exemple est très intéressant. Bien sûr, il est lié à des problèmes spécifiques de disponibilité sur l’agglo de Bordeaux, mais il montre bien que les solutions ne sont pas nécessairement celles qu’on pense. Et que nous manquons terriblement d’espaces collaboratifs pour travailler. La solution n’est pourtant pas très compliquée, techniquement parlant, mais nos politiques savent-ils encore créer des lieux sans fonctions ?

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